Roumanie, début des années 1950. Un jeune homme est retrouvé sur les marches de l’hôpital, frêle comme un oiseau tombé du nid. Le garçon ne prononce pas un mot, impossible de savoir qui il est, d’où il vient. Il ne parvient à s’exprimer qu’en dessinant. Lentement, les souvenirs vont éclore sur le papier : d’abord une colline, puis une étable, des chiens, des samovars, le tableau troublant et mélancolique d’un monde perdu. Seule une jeune infirmière, Safta, connaît secrètement l’identité du jeune homme, qui se révèle être un merveilleux dessinateur au douloureux passé.
Aussi intense dans la description de l’occupation communiste et de ses répercussions dramatiques pour les Roumains que dans la peinture des passions du cœur humain, L’Homme sans mots est un doux orage d’émotions et d’images, et un véritable tour de force dans lequel Georgina Harding réussit la prouesse de créer avec des mots le portrait d’un exilé du langage.
Au début du roman, on suit le voyage d’un homme dans un train, mais pour Augustin, ce voyage n’est pas banal, c’est son ultime chance de retrouver la personne dont il a été séparé depuis si longtemps. Et cette personne, c’est Safta, avec qui il a grandi, il était le fils de la cuisinière, elle était la fille de la « grande maison », en des temps qui sont révolus. C’était avant la Seconde Guerre Mondiale, où la vie était paisible, rythmée par les saisons. Et puis, la guerre est passée par là et avec elle son lot d’horreurs et de chagrin, et tout a changé. Quand il arrive à l’hôpital, Augustin est inconscient et en très mauvais état, il va peu à peu se rétablir. Mais il ne parle pas, il reste totalement hermétique aux autres, il ne cherche pas à communiquer avec le personnel soignant, il semble retiré en lui-même. Seule Safta va réussir, peu à peu à entrer en relation avec lui, et petit à petit, le lien qui les unissait dans le passé va se retisser. On va voyager dans leurs souvenirs, on va découvrir ce qui s’est passé pendant cette période troublée de la guerre, et les événements dramatiques auxquels Augustin a été confronté. Enfant, Augustin s’exprimait par le dessin, il retranscrivait tout ce qu’il l’entourait sur le papier, il fabriquait des figurines représentant les personnes qui l’entouraient. Mais quand, à l’hôpital, Safta lui donne du papier et des crayons, il reste les yeux rivés au plancher, et refuse de dessiner.
Georgina Harding sait rendre à merveille la douleur que ressent Augustin, les sons et les paroles lui sont inutiles, c’est au travers de ses dessins qu’il perçoit la vie, la sienne et celle des autres. Avec Augustin, l’auteure nous plonge dans son monde de silence, dans un monde d’images sans aucun son, donnant ainsi au roman une tonalité très particulière. On se laisse bercer par cette douce lenteur, on visualise chaque scène du roman comme si l’on en faisait partie et on se laisse totalement emporté par ce rythme, sans jamais se lasser. Et la fin arrive beaucoup trop vite, on aimerait continuer à voyager avec Augustin et Safta, juste encore un peu…
Merci à Babelio et aux Editions « Denoël & D’ailleurs » de m’avoir fait découvrir ce joli moment de lecture.
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